La minorité musulmane de Thrace occidentale constitue un cas particulier dans le cadre de l’État grec moderne. Plusieurs paramètres la caractérisent : la reconnaissance institutionnelle de cette population en tant que « minorité » (traité de Lausanne, 1923) ; le fonctionnement des écoles primaires bilingues (grec-turc) sous un régime unique en Grèce d’« éducation minoritaire » ; et la vie quotidienne dépendante des fluctuations diplomatiques entre la Grèce et la Turquie. L’auteur de cet article cherche à voir comment s’inscrivent dans des stratégies identitaires les membres de cette minorité et les différentes mesures du gouvernement grec visant à la levée de leur exclusion sociale. Se référant aux années quatre-vingt-dix, cette recherche s’appuie sur l’analyse des choix que trois familles musulmanes font, concernant le cursus scolaire de leurs enfants. Dans l’expression de leurs dilemmes apparaîtront les divers modes d’appréhension de leur identification ethnique avec la Turquie, tantôt la niant, tantôt la revendiquant.