L'anthropologie dans l'Espace européen de la recherche
Résumé
Cet article s’efforce de montrer comment les politiques européennes mises en œuvre dans le domaine de l’enseignement (processus de Bologne), comme dans ceux de la recherche et du marché de l’emploi (stratégie de Lisbonne), affectent le statut d’une discipline, les modalités de sa reproduction et potentiellement l’objet de ses recherches. Une grande transformation est en jeu avec la construction de l’Espace européen de la recherche, la formulation d’orientations thématiques et l’introduction de procédures contraignantes par le biais du financement des grands programmes-cadres (pcrd et autres). Évoquant dans une perspective critique les effets des techniques d’évaluation (benchmarking), la mise en compétition généralisée et l’impact des incitations européennes sur la redistribution nationale des domaines et structures de la recherche, l’auteur montre qu’un nouveau modèle de chercheur européen est appelé à émerger, le chercheur-entrepreneur. Ces évolutions inspirées par l’idéologie du néolibéralisme renvoient les sciences humaines et sociales à l’appréciation de leur utilité dans la perspective du marché et placent l’anthropologie devant une série de défis tant pour défendre ses pratiques heuristiques que pour renforcer sa visibilité et consolider ses réseaux à l’échelle européenne.
Mots-clés
- Espace européen de la recherche
- Sciences humaines et sociales
- Réseau d’anthropologues