Sur les traces des disparus au Mexique
Le Mexique connaît depuis douze ans des violences extrêmes et massives modifiant en profondeur le traitement politique, culturel et social des disparus et des morts en masse. Devenue récemment une priorité dans l’agenda politique, la disparition, forcée ou non, reste une énigme pour les vivants hantés par l’incertitude et les fantômes. Face à l’inaction de l’État, les familles des victimes font « justice par elles-mêmes » et conjurent cette malemort par deux principales actions : « lire la terre » pour en faire émerger des fosses clandestines et « lire le cadavre » pour rendre une identité à ces morts qui dérangent. À partir d’une description ethnographique d’un dimanche de recherche de fosses clandestines menées en 2016 avec des familles du collectif « Les autres disparus » à Iguala, dans l’État du Guerrero, cet article démontre à quel point suivre les traces des disparus signifie davantage que mener de simples fouilles : les recherches de fosses clandestines concentrent l’opération de restauration d’un ordre matériel et symbolique face au puzzle macabre laissé par les violences politiques et criminelles. Elles constituent de nouveaux rituels modernes et réintroduisent du sens et du sacré là où les traces des crimes sont camouflées.
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