Polysémie, émancipation et nostalgie dans deux processus de politisation de la terre en Italie du Nord
Cet article met en perspective et confronte deux recherches de terrain effectuées dans la région nord-italienne de la Vénétie, mettant en lumière l’imbrication entre aspirations utopistes et nostalgie structurelle. Nous analysons pour ce faire les pratiques agricoles et les discours politiques impliqués dans la transformation et l’usage du territoire, en étudiant la production et la réception des régimes discursifs associés. Cette recherche met en évidence la perméabilité des registres politiques et les déplacements fréquents entre logiques progressistes-émancipatrices et nostalgiques-identitaires dans un monde lié à la petite agriculture politisée à divers titres. Sont ici examinés les réceptions, réélaborations et usages stratégiques de logiques liées à la terre, entendue comme objet polysémique (terre-matière ; terre-racines ; terre-territoire ; terre-espace), dans des circuits qui se veulent politiquement distants. L’objet d’étude est un groupe de néo-ruraux éco-socialistes qui se sont installés dans la Lagune de Venise, examiné tout d’abord en lui-même et deuxièmement au prisme de son réseau militant. Il s’agit d’un monde régional d’activistes éco-socialistes qui a découvert et intégré au Chiapas insurgé le rapport, matériel et spirituel, avec la terre comme horizon existentiel. Le second groupe, dans le même lieu, est composé d’une nouvelle génération de paysans aux orientations souverainistes et indépendantistes-vénétistes à l’horizon entrepreneurial autogestionnaire. Mondes souverainistes vénétistes et activistes éco-socialistes se rencontrent, matériellement et par le discours, s’influencent réciproquement – avec divers degrés de conscience – au nom d’une commune sensibilité environnementale, mêlant langages et aspirations politiques.
- Utopies concrètes
- Nostalgie structurelle
- Autogestion
- Néo-ruraux