Qu’est-ce qui change quand un objet change de mains ?
Il y a près de vingt-cinq ans, peu après la mise sur le marché des trithérapies, de nouvelles formes de mémoire émergeaient en réponse aux pertes humaines et culturelles causées par l’épidémie du VIH/sida. Entre 2002 et 2005, deux anthropologues mènent pour le compte du musée national des Arts et traditions populaires une enquête-collecte sur l’histoire et les mémoires du sida en France, en Europe et en Méditerranée en rassemblant plus de 12 000 artefacts (documentation, matériel de prévention, objets utilisés lors de manifestations, etc.), auprès de nombreuses associations, mais aussi de militants. La fin de la collecte correspond au moment où le musée parisien ferme ses portes, les collections sont alors transférées au musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem), inauguré en 2013. L’article propose un parcours du processus de muséalisation de deux robes, aujourd’hui conservées au Mucem, et ayant appartenu à des Sœurs de la Perpétuelle indulgence, mouvement militant engagé dans la lutte contre le VIH/sida. Qu’est-ce qu’un objet militant gagne, et perd, en entrant au musée ? Que deviennent les données coproduites sur les terrains de la collecte par les anthropologues et leurs partenaires et censées documenter le contexte d’utilisation des objets ethnographiques ? Qu’est-ce qui se produit lorsqu’une Sœur d’aujourd’hui demande au musée d’accéder aux objets d’une Sœur d’hier et quel type de savoir, de documentation, ou quels nouveaux objets la première peut-elle contribuer à apporter ?
- Objets militants
- VIH/sida
- Muséalisation
- Collecte ethnographique
- Transformation institutionnelle
- Métadonnées