Propreté, Saleté, Urbanité
Les tensions autour du propre et du sale offrent un angle privilégié
pour analyser l’administration de la cité et les négociations de
la civilité : tel est l’objet de cette livraison d’Ethnologie française.
La saleté de la ville n’est pas qu’une affaire de microbes et de
pollution, son assainissement est associé à la discipline des corps,
au contrôle des foules et à l’éducation des classes dangereuses ;
elle peut être un instrument politique puissant pour légitimer le
contrôle et l’expulsion de certaines populations. C’est sans doute
pourquoi, sous l’Ancien Régime comme aujourd’hui, en milieu
colonial comme en Europe, l’intervention de la police dans la
mise au propre des villes est récurrente. La saleté urbaine étant
essentiellement celle des Autres, il faut s’en protéger, mais également
s’en arranger.
Les contributions de ce numéro montrent ainsi le travail quotidien
de la civilité urbaine, de la Goutte-d’Or à Garoua (Cameroun),
d’une décharge en Isère aux réseaux d’égouts. Quant à
la gestion des ordures, qu’elle soit confiée aux chiffonniers
du Caire ou à des multinationales, elle s’inscrit aussi dans les
processus de recyclage. La requalification des restes de la ville
par ces mêmes chiffonniers, par des « Roms », ou encore par une
asso ciation berlinoise offre une réponse alternative au modèle de
consommation capitaliste et à ses montagnes de rebuts.
La seconde partie du numéro est consacrée au parcours et à l’oeuvre de Jean-Michel Guilcher, fondateur de l’ethnochoréologie, à l’occasion de son jubilé scientifique.